Sénégal-Gouvernance des ressources extractives : Les leçons des étudiants de l’UGB
Le Sénégal entre dans l’ère pétrolière : enjeux et avantages à comprendre par la population
Le 11 juin 2024 marque une date historique pour le Sénégal. En effet, le pays vient d’entrer officiellement dans le cercle restreint des nations productrices de pétrole avec la production du premier baril de pétrole du gisement de Sangomar. Cet événement suscite de nombreux espoirs, mais également des préoccupations légitimes. Il est crucial de sensibiliser la population sénégalaise aux enjeux socio-économiques et sécuritaires liés à l’exploitation de cette ressource précieuse.
Ces enjeux socio-économiques et sécuritaires de l’exploitation pétrolière sont nombreux et divers.
D’abord, les enjeux socio-économiques peuvent être identifiés à ses trois niveaux : la diversification de l’économie, l’impact sur le marché du travail et les inégalisés économiques.
Diversification de l’économie : La découverte et l’exploitation du pétrole représentent une opportunité pour diversifier l’économie sénégalaise, traditionnellement basée sur l’agriculture et les services. Cette diversification permettra de réduire la dépendance à un nombre limité de secteurs et de renforcer la résilience économique face aux chocs externes. Elle peut se faire suivant différentes stratégies comme : développer les secteurs non-traditionnels (industries de haute technologie, tourisme et culture, services Financiers), encourager l’innovation et l’entrepreneuriat (création incubateurs et accélérateurs, politiques fiscales favorables), renforcer l’éducation et la formation (centres et instituts de formations aux métiers du pétrole et gaz), diversifier les exportations (accords commerciaux, produits diversifiés), investir dans les infrastructures (infrastructures de transport, technologies de l’information et de la communication), politiques publiques et gouvernance (stabilité politique, régulation et concurrence), développement rural et agricole (modernisation de l’agriculture, diversification des cultures), encourager les investissements étrangers (création de zones économiques, partenariats Public-Privé), développer l’économie verte (énergies renouvelables, industries durables), etc. Cependant, il est essentiel de veiller à ce que la « malédiction des ressources » ne frappe pas notre pays, où la dépendance excessive aux revenus pétroliers pourrait nuire aux autres secteurs économiques.
La Norvège est un exemple typique de diversification économique grâce à l’exploitation du pétrole. En effet, la Norvège a utilisé ses revenus pétroliers pour créer un fonds souverain de plus de 1.395 milliard d’euros, le Government Pension Fund Global, qui investit dans une variété de secteurs à l’échelle mondiale. Cela a permis à la Norvège de ne pas dépendre uniquement du pétrole, diversifiant ainsi son économie et assurant une stabilité financière pour les générations futures. C’est l’occasion pour nous de saluer la mise en place par l’état du Sénégal du Fonds Souverain Intergénérationnel qui sera alimenté par les 10% de ses revenus issus de l’exploitation du pétrole et du gaz.
Impact sur le marché du travail : L’industrie pétrolière est susceptible de créer de nombreux emplois, tant directs qu’indirects. Toutefois, il est impératif de développer des programmes de formation pour que la main-d’œuvre locale puisse accéder à ces emplois hautement qualifiés. Les Émirats Arabes Unis (EAU) en sont une belle preuve. Ils ont investi massivement dans l’éducation et la formation professionnelle pour permettre à leur population d’accéder aux emplois dans le secteur pétrolier. Des initiatives telles que l’Institut pétrolier d’Abu Dhabi ont été créées pour former des ingénieurs et des techniciens qualifiés. La création de l’INPG (Institut Nationale du Pétrole et du Gaz) est bonne anticipation faite par l’état du Sénégal.
Inégalités économiques : La gestion des revenus pétroliers doit être transparente et équitable pour éviter l’accentuation des inégalités sociales. Des mécanismes de redistribution équitables, comme des fonds souverains ou des programmes sociaux ciblés, peuvent aider à garantir que les bénéfices du pétrole profitent à l’ensemble de la population.
Le Botswana peut servir de benchmark avec l’exploitation du diamant. En fait, bien que le Botswana ne soit pas un pays producteur de pétrole, il a réussi à utiliser les revenus de ses mines de diamants pour financer des programmes de développement social et économique. Les revenus sont utilisés pour des projets d’infrastructure, de santé et d’éducation, réduisant ainsi les inégalités.
Ensuite, les enjeux sécuritaires constituent un défi majeur : stabilité régionale, protection des infrastructures d’exploitation et l’environnement…
Stabilité régionale : L’afflux de richesses peut susciter des tensions régionales, notamment dans les zones productrices. Il est crucial de mettre en place des stratégies de développement local pour apaiser les éventuelles frustrations et garantir une répartition équitable des bénéfices. Et surtout de sensibiliser la population avec une bonne communication pour leur permettre de comprendre les contrats signés et les avantages qui en découle. Déjà une majorité de nos compatriotes ne comprend le CRPP (Contrat de Recherche et de Partage de Production) signé par l’Etat du Sénégal avec les opérateurs pétroliers (contractant). Elle pense que le Sénégal ne profitera que de 18% des recettes du projet de Sangomar. Ce qui est faux si l’on sait que ces 18% est la part de PETROSEN (Société des Pétroles du Sénégal, appartenant à l’état sénégalais) dans le contractant avec Woodside qui détient les 82% ; et qu’en termes de bénéfices l’Etat du Sénégal sera le plus gagnant en considérant sa part dans le Profit-Oil plus la part de PETROSEN dans le Profit-Oit et le Cost-Oil et les taxes, comme l’Impôt sur les Sociétés (IS) qui est de 30% des bénéfices des entreprises, que l’opérateur versera à l’Etat du Sénégal. Nous allons plus développer cette question en bas.
Le Nigéria doit nous servir de leçon concernant la stabilité sociale. Ce pays a connu des tensions et des conflits dans la région du delta du Niger en raison de la mauvaise gestion des revenus pétroliers. Cela montre l’importance de la mise en place de politiques inclusives et de développement local pour éviter les tensions régionales.
Protection des infrastructures : La sécurisation des installations pétrolières et des infrastructures connexes doit être une priorité. Des mesures doivent être prises pour prévenir le sabotage, le vol de pétrole et les actes de terrorisme. Dans ce sens la surveillance maritime doit être renforcée. Et surtout la sécurité des infrastructures doit être entièrement assurée par l’armée sénégalaise pour éviter toute sorte mépris.
On se rappelle des attaques de drones des deux installations pétrolières du géant saoudien Aramco, du samedi 14 septembre, à Abqaiq et à Khurais, dans l’est de l’Arabie Saoudite. Les conséquences de ces attaques ont été en tout cas sans précédent pour le royaume, forcé de réduire de moitié sa production de pétrole. Ce qui avait également affecté le reste du monde, le marché étant privé de 5,7 millions de barils de brut par jour, soit près de 6 % de la production journalière mondiale d’or noir.
Environnement : La production pétrolière comporte des risques environnementaux majeurs, tels que les marées noires et la pollution. Un cadre réglementaire strict et des technologies avancées doivent être mis en œuvre pour minimiser ces risques. Une marée noire par exemple entrainerait une dégradation du biotope et de l’écosystème via l’asphyxie du milieu, puis la destruction des fonds marins et de l’habitat de nombreux animaux. En 1999, le naufrage de l’Erika au large de Penmarch (Finistère) a libéré près de 20 000 t de fioul qui ont pollué 400 km environ de côtes du Finistère, du Morbihan, de la Loire-Atlantique et de la Vendée, et provoqué la mort de plusieurs centaines de milliers d’oiseaux.
Nonobstant tous ces enjeux et défis cruciaux qui attend le Sénégal dans l’exploitation pétrolière, les avantages potentiels à en tirer sont nombreux.
L’exploitation du pétrole peut considérablement booster la croissance économique du Sénégal. Avec le projet Sangomar une production de 100 000 barils/jour est visée pour un prix actuel de 80 dollars le baril sur le marché mondial. Il est à noter que le prix du baril actuel est avantageux pour le Sénégal car le projet Sangomar a été évalué sur la base d’une hypothèse de 65 dollars le baril du pétrole.
Dans ce projet l’Etat du Sénégal a signé un CRPP (Contrat de Recherche et de Partage de Production) avec un contractant composé de PETROSEN avec un actionnariat de 18% et Woodside opérateur principal avec une part de 82%. La répartition des revenus de la première phase de l’exploitation du gisement prévue sur 25 ans est ainsi retenue selon le CRPP : 75 % pour le Cost Oil (coûts pétroliers) et 25% pour le Profit Oil (profit pétrolier ou bénéfices). En effet dans ce type de contrat la production est divisée en deux parties. Une part pour les coûts pétroliers (Cost Oil) et une part pour le profit ou bénéfice pétrolier (Profit Oil).
Et avec la production journalière de 100 000 barils, les 25% du Profit Oil reviennent à l’état du Sénégal plus les 18% de PETROSEN dans le contractant. Ce qui va générer d’importants revenus pour le Sénégal : soit 43% du Profit Oil. Et ceci est en dehors des impôts et taxes que les opérateurs vont payer à l’Etat du Sénégal. Sans oublier aussi que dans les le Cost Oil (75% des revenus pétrolier) la PETROSEN en dispose les 18% ; ce qui va revenir encore à l’Etat du Sénégal.
Les recettes générées peuvent être investies dans des projets d’infrastructures, d’éducation, de santé et d’autres secteurs essentiels pour diversifier l’économie, améliorant ainsi le niveau de vie de la population. Elles peuvent être un levier important de création d’emplois. La nouvelle industrie pétrolière peut créer des milliers d’emplois, tant dans le secteur de l’extraction que dans les industries connexes comme la pétrochimie. Cela peut réduire le chômage et augmenter le revenu des ménages.
L’exploitation pétrolière et gazière aussi jouera un rôle crucial dans l’autosuffisance énergétique du pays, notamment pour l’électricité. En développant ses ressources pétrolières et gazières, le Sénégal peut réduire sa dépendance aux importations d’énergie coûteuses, stabiliser les prix de l’électricité et assurer une production électrique plus fiable. Les statistiques de l’AFREC pour 2020 montrent que la production de pétrole brut du Sénégal était de 1 561 ktep, et que le pays a importé 3 273 ktep de pétrole brut et 385 ktep de produits pétroliers. D’où la nécessité de réduire notre dépendance d’énergie vis à de l’extérieur. Le projet « Gas to Power » avec le gaz des champs de Sangomar et Grand Tortue Ahmeyim,(GTA) est essentiel pour atteindre cet objectif. De plus, l’augmentation de la production locale d’énergie contribue à la croissance économique, à la création d’emplois et à l’amélioration des infrastructures énergétiques.
En outre, l’exploitation du pétrole peut permettre le renforcement de la position géopolitique du Sénégal. En effet, en devenant un producteur de pétrole, le Sénégal peut renforcer sa position sur la scène internationale. Les alliances stratégiques et les partenariats économiques avec d’autres nations peuvent être renforcés, apportant des bénéfices supplémentaires en termes de sécurité et de développement économique.
En sommes l’entrée du Sénégal dans le club des producteurs de pétrole est une opportunité historique. Toutefois, elle s’accompagne de défis majeurs. Une gestion avisée, transparente et équitable des ressources pétrolières est essentielle pour garantir que cette richesse bénéficie à l’ensemble de la population. En même temps, les avantages potentiels en termes de croissance économique, de création d’emplois et de développement des infrastructures peuvent transformer le Sénégal en une économie plus prospère et résiliente. Le défi est grand, mais les opportunités le sont tout autant.
Par Ousseynou SOKHNA
Jeune Ingénieur Géologue, passionné du secteur Oil and GAS
Sangomar : Les Sénégalais doivent s’engager dans les filières pétrolières
Avec l’extraction des premiers barils de pétrole du projet Sangomar, le Sénégal entre dans une nouvelle ère économique. M. Lamine Diack Diouf, ingénieur géologue sénégalais, exhorte ses compatriotes à s’engager dans les filières pétrolières.
Selon M. Diouf, il est crucial que les Sénégalais ne se limitent pas au rôle de simples observateurs de l’exploitation pétrolière. « Nous devons nous préparer à capter les opportunités qu’offre l’aval pétrolier tels que le transport et la transformation des hydrocarbures », a-t-il déclaré.
Il a cité l’exemple de l’homme d’affaires nigérian Aliko Dangote, qui a récemment inauguré la plus grande raffinerie d’Afrique de l’Ouest. « Dangote a ouvert la voie en investissant dans le raffinage. Le Sénégal devrait s’en inspirer et envisager la construction d’une nouvelle raffinerie ou d’autres unités de transformation », a suggéré M. Diouf.
Il recommande également d’investir dans le transport du gaz naturel extrait à Sangaomar. « Les Sénégalais pourraient amener des méthaniers pour acheminer le gaz vers l’Europe ou d’autres marchés », a-t-il proposé. Il ajoute que cela pourrait créer des emplois et générer des revenus supplémentaires pour le pays.
Le patron de Konkoutou Gold appelle à recentrer le débat public sur la valorisation des ressources pétrolières plutôt que sur la simple gestion des revenus par l’État. Pour lui, l’enjeu n’est pas seulement de surveiller la gestion des fonds par le gouvernement, mais de déterminer comment nous, en tant que Sénégalais, peut accroître ces revenus.
Lamine Diack Diouf encourage une mobilisation nationale pour exploiter les opportunités offertes par le pétrole de Sangaomar. « C’est une chance unique de transformer notre économie et d’améliorer le bien-être de tous les Sénégalais. Saisissons cette opportunité pour les générations futures », conclue l’ingénieur géologue et homme d’affaires Sénégalais.
Yanda Sow
Sénégal-Mines : Les anciens des ICS fustigent un « banditisme économique » et prônent sa renationalisation
Les membres du Conseil National des dirigeants d’entreprises du Sénégal (CNDES) et du Groupe Secteur Privé et Développement (GSPD), ainsi que d’anciens employés des Industries Chimiques du Sénégal (ICS), ont adressé une requête à l’Etat sénégalais pour la renationalisation de la société. Selon eux, cette décision permettrait de redresser la situation de l’ICS qui perd du terrain dans le marché africain des engrais.
Monsieur Aziz Ndiaye, porte-parole du collectif, a souligné que la renationalisation est possible et peut se faire sans grande difficulté. Il a dénoncé ce qu’il qualifie de « banditisme économique » orchestré par les ICS depuis plusieurs années.
« Les Industries Chimiques du Sénégal doivent à l’Etat plus de 200 milliards de francs en redevances minières qu’elles refusent de payer malgré leur caractère obligatoire selon le code des mines », a-t-il déclaré.
Ndiaye a également souligné que l’entreprise semble intouchable et n’apporte aucune contribution financière à l’Etat. En effet, les ICS ne paient ni impôts sur le revenu, ni TVA, ni droits de douane, encore moins de redevances minières.
Le porte-parole du collectif estime que la dette des ICS (supérieure à son capital de 130 milliards de francs) offre une opportunité de renationaliser l’entreprise. L’Etat pourrait ensuite ouvrir progressivement le capital aux investisseurs privés nationaux avant de se retirer complètement.
Depuis 2014, les ICS sont contrôlés par le groupe indonésien Indorama, via sa filiale Indorama Private limited. Le capital est structuré avec des parts des différents partenaires avec Indorama qui détient 78% des parts, le gouvernement du Sénégal avec 15%, IFFCO 6,78% et le gouvernement de l’Inde qui détient 0,22%.
Concernant la production d’engrais, M. Ndiaye a rappelé les accords qui lient le Gouvernement du Sénégal à IFFCO et qui prévoyaient que 20% de la production d’acide phosphorique soient réservés à l’usine de Mbao pour la fabrication d’engrais. Cette production aurait pu couvrir les besoins en engrais du Sénégal jusqu’à 300 000 tonnes.
Cependant, en 2013, l’Etat du Sénégal a décidé de céder la totalité de l’acide phosphorique à IFFCO, privant ainsi le pays de ses 20% d’acide et de sa capacité à produire des engrais. Ce qui donne la possibilité désormais aux ICS d’exporter la totalité de son acide phosphorique essentiel pour la fabrication d’engrais vers l’Inde qui est un grand pays agricole.
Cependant, il est important de noter que la renationalisation des ICS est une question complexe qui dépend de plusieurs paramètres. Il est important d’analyser tous les aspects de la situation avant de prendre une décision définitive.
Yanda Sow
Gouvernement Pétrole et Energie : Le grand ménage
Le Conseil des ministres du Sénégal, réuni ce mercredi 5 juin 2024, a procédé à un remaniement important au sein du secteur du pétrole et de l’énergie.
Dans le but de renforcer la gouvernance et la performance de ce secteur crucial pour le développement économique du pays, de nouvelles nominations ont été effectuées.
Ainsi, Monsieur Papa Toby GAYE, ingénieur électronicien et ancien Secrétaire général de la Société nationale d’électricité (SENELEC SA), est désormais à la tête de la SENELEC SA, en remplacement de Monsieur Papa Mademba BITEYE.
Le poste de Directeur général de la Société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN Holding SA) est désormais occupé par Monsieur Alioune GUEYE, expert-comptable, qui succède à Monsieur Adama DIALLO.
Monsieur Mouhamadou DIOP, ingénieur polytechnicien des ponts et chaussées, prend la direction de la Société des Pétroles du Sénégal (PETROSEN Trading and Services SA), en remplacement de Monsieur El hadj Manar SALL.
A la tête de l’Agence sénégalaise d’Electrification rurale (ASER), on retrouve désormais Monsieur Jean Michel SENE, ingénieur électronicien et énergéticien spécialisé en instrumentation nucléaire, qui succède à Monsieur Baba DIALLO.
Madame Mame Coumba NDIAYE, ingénieur statisticienne et économiste de l’énergie, est nommée Directeur général de l’Agence pour l’Economie et la Maitrise d’Energie (AEME), en remplacement de Monsieur Saër DIOP.
Enfin, Monsieur Mor BAKHOUM, maître de conférences assimilé en droit de la concurrence, occupe le poste de Secrétaire technique du Conseil national de Suivi du Contenu Local au Ministère de l’Energie, du Pétrole et des Mines.
Ces nouveaux dirigeants, tous dotés d’une expérience avérée dans leurs domaines respectifs, sont attendus pour apporter leur expertise et leur dynamisme à la tête de ces institutions stratégiques.
Par ailleurs, ces différentes nominations interviennent dans un contexte particulier ou le Sénégal est en passe de démarrer de manière imminente l’exploitation du pétrole et du gaz. La question est de savoir quelle sera les conséquences de ces nominations sur les projets pétroliers et les orientations prises par l’Etat sur le secteur.
Yanda Sow
Exploitation hydrocarbures-Sénégal : Des réformes pour plus de transparence
Lors d’un atelier organisé par la Coalition « Publiez Ce Que Vous Payez-Sénégal » (PCQVP) dans le cadre du programme PASC financé par l’Union Européenne, des discussions cruciales ont eu lieu sur les défis de gouvernance et les mécanismes de redistribution des revenus dans le secteur des hydrocarbures au Sénégal et des réformes nécessaires pour garantir la transparence et la redevabilité.
Dr. Pape Fara Diallo, président de la coalition PCQVP-Sénégal, a souligné l’importance de ces discussions pour garantir que l’exploitation des hydrocarbures profite effectivement aux populations. « Cet atelier a jeté les bases pour des réformes essentielles visant à garantir que les ressources extractives du Sénégal bénéficient réellement à sa population, en particulier aux collectivités locales qui en supportent les impacts directs. La transparence, la redevabilité et une gouvernance efficace restent les pierres angulaires de cette ambition, » a-t-il déclaré.
Un des points majeurs abordés a été la nécessité de repenser les mécanismes créés à savoir le fonds intergénérationnel dans sa structuration et son administration par le Fonds Souverain d’Investissements Stratégiques (FONSIS). Les participants ont exprimé des préoccupations sur la transparence et la redevabilité de cet organe, appelant à des réformes pour garantir une gestion plus transparente des fonds. La crédibilité et l’efficacité du FONSIS ont été remises en question, suscitant des appels à une révision de son mode de fonctionnement.
En effet, contrairement au secteur minier, déjà bien établi, le secteur des hydrocarbures démarre dans un contexte favorable pour la mise en place d’une politique renforcée de transparence et de redevabilité. Bien que l’exploitation du gaz et du pétrole n’ait pas encore commencé, les premiers barils du projet Sangomar sont attendus d’ici la fin du mois de juin. Cet atelier a permis à la société civile d’anticiper sur des problématiques telles que la gouvernance du secteur des hydrocarbures et de discuter des mécanismes prévus pour une redistribution équitable des futurs revenus qui seront générés.
Boubacar Tamba, membre de la coalition PCQVP, a annoncé que la coalition prévoit de rencontrer les nouvelles autorités pour explorer les possibilités de revoir la situation actuelle. « Nous avons retenu, lors de ces jours intenses de discussions, de rencontrer les nouvelles autorités pour voir avec elles les possibilités de revoir cette situation. À partir de ce moment, nous pourrons envisager de nouvelles réformes de la loi sur le code minier ainsi que celle du code pétrolier, et le cas échéant, les mettre en œuvre rapidement pour que cet acte fondamental de la constitution puisse devenir une réalité, » a-t-il affirmé.
Cet atelier a marqué une étape importante dans les efforts visant à assurer que les revenus des ressources extractives du Sénégal soient utilisés de manière transparente et bénéficient réellement à la population, en particulier aux collectivités locales directement affectées par les activités extractives. Les discussions ont souligné l’importance d’une gouvernance efficace et de réformes législatives pour soutenir le développement économique et social du pays. La coalition PCQVP-Sénégal reste déterminée à collaborer avec toutes les parties prenantes pour atteindre ces objectifs.
Redistribution Revenus Extractifs-Sénégal : PCQVP Appelle à l’Action
La Coalition PCQVP-Sénégal, dans le cadre de la mise en œuvre du programme PASC financé par l’Union Européenne, a récemment organisé un atelier de partage focalisé sur les mécanismes de gouvernance et de redistribution des revenus issus du secteur extractif. Cet événement a réuni des experts, des représentants du ministère du Pétrole, des Énergies et des Mines, la société civile, ainsi que les médias, pour discuter de la manière dont ces revenus peuvent véritablement bénéficier aux populations sénégalaises.
Docteur Pape Fara Diallo, président de la coalition « Publiez ce que vous payez-Sénégal », a souligné lors de cet atelier que le secteur extractif avait généré en 2022 un peu plus de 275 milliards de francs CFA pour l’État du Sénégal. « Cependant, il s’est dit préoccupé par le fait que ces revenus considérables ne se reflètent pas dans le quotidien des Sénégalais, en particulier dans les collectivités territoriales qui abritent les sites d’exploitation minière. En effet, le secteur minier à lui seul a contribué à hauteur de 235,71 milliards de francs CFA, soit 85,61 % de la contribution globale du secteur extractif au budget de l’État ».
Ainsi l’État du Sénégal a mis en place deux principaux mécanismes de redistribution : le fonds de péréquation et le Fonds d’appui au développement local, consacrés par les articles 114 et 115 du code des mines de 2016. Ces fonds sont destinés à soutenir le développement économique des collectivités locales, particulièrement celles abritant des opérations minières. Cependant, malgré les décrets et arrêtés pris en ce sens, l’effectivité de ces fonds reste problématique. Les experts présents ont identifié plusieurs obstacles et proposé des solutions qui seront soumises aux nouvelles autorités pour garantir une mise en œuvre efficace de ces fonds.
Mouhamadou Ndour, Directeur des mines, a souligné que le Sénégal dispose d’un cadre réglementaire et institutionnel solide pour répondre aux enjeux de bonne gouvernance dans le secteur minier. « La publication de tous les contrats et la mise en ligne du portail du cadastre minier contribuent à la transparence et à la redevabilité. De plus, le renforcement des moyens de la direction du contrôle pour une meilleure surveillance des opérations minières est en cours, ce qui pourrait augmenter les recettes issues du secteur des mines. C’est dans cette perspective la création d’une agence de gestion de ces fonds pourrait accompagner les collectivités locales dans l’utilisation optimale des ressources financières, contribuant ainsi au développement économique et social des communautés locales ».
Pour sa part l’honorable député Ayip Daffe a exprimé sa satisfaction quant aux orientations du nouveau gouvernement visant à accroître la transparence et la redevabilité dans la gestion des affaires publiques, en particulier dans le secteur extractif. Il a insisté sur l’importance de travailler de concert entre l’Assemblée nationale, le ministère de tutelle et la société civile pour assurer l’effectivité et l’efficacité des mécanismes de redistribution. « ll est important que toutes les parties prenantes du secteurs travaillent en synergie afin de rendre effectifs ces fonds pour une meilleure prise en charges des préoccupation des populations »
Yanda Sow
Sénégal-Pétrole et gaz : Entre Opportunités et Défis
Le Sénégal aborde un virage décisif à la veille de l’exploitation de ses importants gisements de pétrole et de gaz naturel. Ces ressources devraient stimuler considérablement l’économie du pays. Le peuple s’attend à une transformation structurelle et à une amélioration de son niveau de vie. Cependant, la gestion efficace de ces ressources naturelles s’avère cruciale pour maximiser les retombées positives et minimiser les risques potentiels.
Les réserves de pétrole et de gaz découvertes au Sénégal sont estimées à des valeurs considérables. Leur exploitation pourrait générer des revenus importants pour l’État, permettant d’investir dans des secteurs clés tels que l’éducation, la santé, les infrastructures et la diversification économique. Cela pourrait se traduire par une création d’emplois à grande échelle, une réduction de la pauvreté et une amélioration globale du bien-être de la population.
En effet si l’exploitation du pétrole et du gaz peut constituer un moteur de croissance économique important, il est essentiel de ne pas en dépendre de façon excessive. Le Sénégal doit diversifier son économie en investissant dans d’autres secteurs porteurs tels que l’agriculture, le tourisme et les technologies de l’information et de la communication. De plus, il est impératif de veiller à une exploitation durable des ressources naturelles, en préservant l’environnement et en mettant en place des mécanismes pour la gestion des revenus pétroliers et gaziers sur le long terme.
A ce titre, la gestion des ressources pétrolières et gazières doit se faire dans un cadre de gouvernance transparente et inclusive. Il est crucial de mettre en place des mécanismes de contrôle et de redevabilité pour garantir que les revenus générés soient utilisés de manière responsable et équitable.
La participation active de la société civile et des communautés locales dans le processus décisionnel est essentielle pour garantir que les retombées positives de l’exploitation des ressources soient profitables à tous.
Il est nécessaire de développer des compétences techniques et professionnelles adaptées aux exigences des nouveaux secteurs d’activité créés par l’exploitation des ressources naturelles. Cela va garantir aux Sénégalais des opportunités d’emplois et contribuer activement à la transformation économique du pays.
Le développement d’infrastructures adéquates, telles que des ports, des routes, des installations de stockage et de transport, est indispensable pour soutenir l’exploitation efficace des ressources pétrolières et gazières. Des investissements dans ce domaine contribueront à fluidifier les opérations, à réduire les coûts et à améliorer la compétitivité du Sénégal sur le marché international de l’énergie.
Le pays dispose d’atouts considérables pour transformer son économie grâce à ses ressources en pétrole et en gaz. Cependant, cette transformation doit se faire de manière réfléchie et inclusive, en veillant à une gestion durable des ressources, à une diversification économique, à une gouvernance transparente et à un investissement dans sur le capital humain.
En adoptant une approche stratégique et responsable, le Sénégal peut saisir cette opportunité de propulser son développement économique et d’améliorer le bien-être de sa population actuelle et des générations à venir.
Yanda Sow
Sénégal-MIFERSO: Une gestion chaotique révélée par la Cour des Comptes
La Société des Mines de Fer du Sénégal Oriental (MIFERSO) est accablée par le rapport de la Cours des Comptes. Entre des missions opaques, des incohérences dans les achats, et des octrois de marchés douteux, cette entreprise semble faire fi de toutes les règles de bonne gouvernance et d’organisation régies par la loi.
Une récente revue des documents a mis en lumière le désengagement de tous les actionnaires, exception faite de la BRGM/SEREM, dont la participation est passée de 23,8% à seulement 1,2%. Cette situation a pour conséquence une charge disproportionnée supportée par la MIFERSO, reposant principalement sur les subventions de l’État.
Entre 2014 et 2018, la MIFERSO a reçu des subventions considérables de l’État sénégalais, s’élevant à 1 164 650 000 de francs CFA. Cependant, ce financement semble être utilisé de façon opaque. Des frais de mission exorbitants pour le ministère des Mines et de la Géologie ont été relevés, totalisant 16 684 400 FCFA pour la seule période de 2017 à 2018. Ces frais ont bénéficié à des personnalités influentes telles que Mme Sophie Gladima et son cabinet, ainsi que M. Abdou Ndéné Sall, sans oublier les techniciens du ministère.
De plus, la MIFERSO a pris en charge des dépenses liées à des frais de mission et de déplacement pour le Ministère de l’Industrie et des Mines, en violation flagrante des directives gouvernementales énoncées dans la circulaire n°0454/PM/SGG/SGA/SP/bkg du 10 mai 2004.
Le rapport pointe également du doigt des manquements graves dans la gestion du parc automobile de la MIFERSO. Un rapprochement entre le fichier des immobilisations et la comptabilité a révélé un écart important sur le compte enregistrant le matériel de transport. Les achats de véhicules entre 2005 et 2016 s’élèvent à 198 180 000 FCFA et ceux du matériel de transport à 93 500 000 FCFA, pour un montant total de 291 680 000 FCFA. L’opacité qui entoure ces achats et la gestion du parc automobile soulève de fortes suspicions de malversations.
En violation des dispositions réglementaires, la MIFERSO a accordé des dons et subventions d’une valeur de 46 967 787 FCFA durant la période sous revue. Parmi ces largesses, un appui financier de 5 000 000 FCFA à Mme Aïssatou Sophie Gladima pour l’organisation des journées des sciences de la terre en mai 2018, et des appuis sociaux internes et externes de 6 000 000 FCFA à l’occasion du Ramadan et de la Tabaski en juin 2016. Ces pratiques illégales ont appauvri la société et fragilisé sa situation financière déjà précaire.
La principale source de revenus de la MIFERSO devrait provenir des produits issus des permis de recherche et des activités d’exploitation minière. Cependant, aucune recette de cette nature n’a été enregistrée sur la période de contrôle. La société semble dépendre presque exclusivement des subventions de l’État, ce qui crée un déséquilibre financier préoccupant, avec des charges d’exploitation qui grèvent ces subventions à des taux alarmants.
Une masse salariale démesurée ?
L’analyse de la masse salariale révèle également une situation critique. Cette dernière représente la part la plus importante de la subvention de l’État, dépassant souvent le montant même de ladite subvention. Cette réalité met en lumière l’insoutenabilité des charges d’exploitation de la MIFERSO.
Finalement, il apparaît que la survie même de la MIFERSO entre 2014 et 2018 est due au reversement par l’État d’une partie des honoraires d’avocats et frais d’arbitrage concernant le contentieux avec Kumba Resources.
Face à cette situation alarmante, il est impératif que des mesures correctives soient rapidement mises en œuvre pour restaurer la transparence, l’intégrité et la viabilité financière de la MIFERSO. L’État se doit d’exiger des comptes clairs et une gestion responsable de cette entité cruciale pour le développement économique du pays.
À suivre…
Yanda Sow