Au Sénégal, des habitants de certaines localités du pays sont menacés par le plomb. « Plusieurs enfants ont perdu la vie à cause de la contamination par le plomb, liée à la présence d’une usine de recyclage de batteries dans la région« . Une révélation du Dr Mamadou Salif Sané, enseignant chercheur et chargé de programme au CRADESC. Un diagnostic d’une gravité extrême qui interpelle, au plus haut niveau, les autorités.
Le Centre de recherche et d’Action sur Droits Economiques Sociaux et Culturels (CRADESC), estime qu’à Ndiakhat, les études révèlent une exposition significative des habitants au plomb, une substance extrêmement toxique. « Le plomb est particulièrement dangereux pour les enfants, qui sont les plus exposés », alerte le Dr Sané. Face à cette situation alarmante, le CRADESC accompagne depuis plusieurs années les communautés locales, notamment celles de Keur Moussa et Diender, où l’usine GANESHA, devenue aujourd’hui EMP Sarl, continue de dégrader l’environnement, selon le rapport de l’Organisation.
Les actions menées par les populations locales ont conduit le ministère de l’Environnement à commander une enquête sur la pollution dans la région. Les résultats de cette étude ont montré que les niveaux de pollution « dépassaient largement les normes internationales », entraînant le retrait temporaire de l’autorisation d’exploitation de l’usine GANESHA. Cependant, malgré ces alertes, « l’usine a pu reprendre ses activités sous prétexte d’écouler son stock, et elle opère toujours aujourd’hui, plus de neuf mois après cette décision », a déploré le Dr Sané.
Mouhamadou Ciss, Secrétaire général du collectif des impactés de Ndiakhat, a exprimé son inquiétude face aux conséquences néfastes de l’usine de recyclage de batteries sur la communauté. « Depuis son installation, les habitants de notre village sont confrontés à de nombreuses difficultés, notamment en ce qui concerne leur santé, avec une augmentation des maladies respiratoires, cutanées, et des cas de fausses couches », s’est-il plaint. « Même s’il est difficile d’établir un lien direct entre ces maladies et les activités de l’usine, nous constatons que notre santé se dégrade de jour en jour », regrette M. Ciss.
L’avis d’expert qui culpabilise l’usine
Pathé Dieye, expert environnementaliste consultant pour le CRADESC, a également mis en évidence « les nombreuses défaillances » de l’usine EMP dans le respect des normes environnementales. « Le plomb est une substance hautement toxique de première classe selon le code de l’environnement. Elle se bio-accumule dans les organismes vivants et peut causer des cancers, voire la mort, lorsque le seuil de toxicité dans le sang est atteint », a-t-il expliqué. « L’impact de l’usine sur l’environnement, notamment les zones maraîchères et sylvopastorales environnantes, est tout aussi préoccupant », a ajouté M. Dieye.
Une étude du cabinet ELAW, basée aux États-Unis, a révélé que « l’usine EMP ne respecte pas les normes internationales en matière de confinement des activités, de protection des travailleurs, et de stockage des matériaux toxiques ». Cette absence de mesures de sécurité met en péril non seulement les travailleurs de l’usine, mais aussi l’ensemble de la population environnante.
Les populations locales, soutenues par le CRADESC, appellent à des « actions concrètes » pour protéger leur santé et leur environnement face aux dangers du plomb. Elles demandent aux autorités de « faire respecter les normes en vigueur » pour les installations industrielles, afin de prévenir de nouvelles catastrophes sanitaires et écologiques.
Le CRADESC a renforcé les capacités de journalistes et d’influenceurs sénégalais sur les dangers du plomb pour interpeller les autorités sur la nécessité de retirer les autorisations données à l’usine de EMP.
Yanda Sow