Le Sénégal se trouve à un carrefour crucial entre la transition énergétique et la réduction des émissions de méthane, deux objectifs essentiels mais parfois contradictoires. Lors de la deuxième journée du dialogue multi-acteurs organisé par NRGI, les efforts, les défis et les opportunités liés à cette double ambition ont fait l’objet d’échanges avec d’éminents spécialistes.
Pape Daouda Diene, analyste économiste senior à l’Institut de Gouvernance des Ressources Naturelles (NRGI), a mis en lumière les ambitions énergétiques du Sénégal, un pays émergent dans le secteur du gaz. Il a présenté le plan « Gas-to-Power » du Sénégal, qui vise à améliorer l’accès à l’électricité tout en soutenant les objectifs de développement économique du pays.
Cependant, cette transition ne va pas sans défis. L’approvisionnement en gaz, principalement dépendant du projet Yakaar-Teranga, reste incertain. De plus, financer les infrastructures gazières devient de plus en plus complexe dans le contexte actuel de transition énergétique mondiale.
Le Sénégal a signé un accord JETP (Just Energy Transition Partnership) avec des partenaires du G7 pour développer les énergies renouvelables. Bien que cet accord soit une avancée significative, M. Diene a souligné l’importance de respecter les engagements financiers pour éviter que le gouvernement ne se tourne vers des solutions moins durables.
En outre, il est crucial que le Sénégal planifie davantage de projets d’énergies renouvelables pour se préparer à toutes les éventualités. Le rapport de NRGI explore la stratégie « Gas-to-Power » du Sénégal, qui prévoit de développer une capacité de conversion du gaz en électricité de plus de 3 gigawatts (GW) d’ici 2050, visant à réduire la dépendance au fioul lourd, stabiliser les coûts énergétiques et diminuer les émissions de gaz à effet de serre.
Le Sénégal se heurte également à des défis financiers. La construction des infrastructures nécessaires nécessitera au moins 2,2 milliards de dollars, tandis que les sources de financement internationales pour les projets gaziers se raréfient.
Pape Samba Ba, directeur des hydrocarbures au ministère des Énergies, du Pétrole et des Mines, tout en se félicitant de la trajectoire du Sénégal à travers sa stratégie gaz to power pour impulser son développement économique, a rappelé l’importance de garder l’équilibre entre les besoins du Sénégal en termes d’énergie et les émissions de méthane dans les projets pétroliers et gaziers du Sénégal. En effet les Contributions Déterminées au niveau National (CDN) et des engagements pris à Glasgow pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, en particulier le méthane méritent beaucoup d’attention. C’est dans ce sens que le Sénégal a interdit le torchage et les centrales au charbon, prévoyant de remplacer le fuel lourd par du gaz moins polluant.
Il est impératif de mettre en place un cadre réglementaire solide pour le suivi des émissions, incluant des dispositifs de mesure, de rapportage régulier et un organe de contrôle efficace. La transparence et la redevabilité sont essentielles pour atteindre ces objectifs climatiques.
Lamine Diouf, de la direction de l’environnement et des établissements classés, a souligné que la mise en œuvre de la politique climatique nécessite une coordination entre tous les secteurs concernés. Le Sénégal a besoin de l’appui international pour financer des projets et faire face aux impacts climatiques, tout en restant un acteur engagé dans la lutte contre le changement climatique au niveau international.
L’équilibre entre la transition énergétique et la réduction des émissions de méthane est essentiel pour le Sénégal. Le pays doit continuer à investir dans les énergies renouvelables tout en développant ses ressources gazières de manière responsable. Une approche équilibrée et transparente permettra au Sénégal de tirer parti de ses ressources énergétiques tout en respectant ses engagements environnementaux.
Yanda Sow