Saint-Louis : Les déplacés de Khar Yalla toujours oubliés, près de dix ans après

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À Khar Yalla, un site de relogement provisoire en périphérie de Saint-Louis, plus de 1 000 personnes survivent encore dans la précarité près de dix ans après leur déplacement. Ces familles avaient été évacuées de la Langue de Barbarie, cette étroite bande de sable qui sépare le fleuve Sénégal de l’océan Atlantique et où se trouvaient leurs maisons mais aussi leur principale source de revenus la mer.

Entre 2015 et 2016, l’avancée de la mer, conséquence directe du changement climatique, a provoqué d’importantes destructions dans cette partie de la vieille ville, contraignant les autorités à déplacer des centaines de ménages. Installés depuis lors dans le campement temporaire baptisé « En attendant Dieu », ces habitants vivent toujours dans des conditions précaires, loin de leur milieu de vie d’origine.

Le site ne compte que 68 habitations de fortune, souvent construites en matériaux de récupération, où s’entassent des familles entières. L’absence d’infrastructures de base accentue la vulnérabilité. « Depuis 2016, nous sommes laissés à nous-mêmes. Il n’y a pas de structures de santé, pas d’école pour les enfants. Certaines femmes continuent même d’accoucher à domicile, faute de centre de santé », déplore Khady Gueye, présidente des jeunes du site.

Le rapport de Human Rights Watch dénonce de graves violations des droits fondamentaux des déplacés, notamment l’accès à un logement convenable, à l’éducation et à la santé. Le document révèle que les habitants de Khar Yalla n’ont pas été inclus dans le vaste programme de réinstallation financé par la Banque mondiale, qui vise pourtant 15 000 autres habitants de Saint-Louis exposés à l’érosion côtière.

De fortes recommandations ont été formulées par la Banque mondiale aux autorités sénégalaises pour trouver une solution durable, mais selon HRW, aucune suite n’a encore été donnée. Les autorités n’ont pas encore donnéees de reponses ou bien d’orientations claires par rapport au sort de ces populations dans un espace de temps clairement défini .

Cette situation contraste avec l’expérience de Pikine, où des familles déplacées ont pu bénéficier d’un programme de logements sociaux, retrouvant ainsi une stabilité. Les populations de Khar Yalla réclament la même attention. « Nous ne voulons pas rester éternellement dans ces abris temporaires. Nous demandons à rejoindre les projets de relogement durable de la Banque mondiale, afin de retrouver une vie digne », plaide la communauté, privée depuis près d’une décennie de son environnement marin, véritable moteur de son économie.

Pour Human Rights Watch, l’urgence est désormais de transformer cette attente interminable en perspectives réelles de dignité et de stabilité, afin que les victimes du changement climatique ne soient pas doublement punies, d’abord par la mer qui avance, ensuite par l’oubli des décideurs.

 

Yanda Sow

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